Sunday, March 17, 2013

ALLES WAS MINIMAL IST


special guest: Douglas Park
14/09/2007 – 23/09/2007
ALLES WAS MINIMAL IST contains more than 40 works carfully chosen to rreflect some of the main issues in Kurt Ryslavy’s oeuvre. These key works are connected to reference material taken from the artist’s personal archive: models and objects he bought and sells as a starting point for paintings, objects, books, magazines and photographs he used for his works, different videos, etc. – historic art. The basic idea of this show is to map Ryslavy’s field of thinking through the use of objects, images and words. There are discoveries to be made in his early writings, and in his film projects, where many of the basic concepts were developed. Moving through the rooms of the Villa Truk in Koekelberg, where Ryslavy has installed his second show in Brussels since 1994, will provoke a wide range of associations, as will loose items of source material published to accompany the exhibition.
http://www.ryslavy.com/
Center for Contemporary Non-Objective Art (CCNOA)Boulevard Barthelemylaan 5  Plattegrond via Google 
B-1000 Brussel, België 
T +32-2-5026912 

www.ccnoa.org

Alles was minimal ist by Emmanuel Tête

19 November 2007
Une exposition dans laquelle l’artiste Autrichien Kurt Ryslavy nous propose la transposition du "théâtre" du marché aux puces au CCNOA une galerie d’art destinée à la promotion de démarches plastiques conceptuelles et minimales.
Lors du vernissage, la mise en scène comprend des installations d’objets divers (peintures, jouets, cintres, camescope, etc...) posés sur des rideaux à même le sol, un acteur jouant le brocanteur, un brocanteur du marché aux puces, une vendeuse d’escargots et l’artiste lui-même servant du vin.
Ce dispositif scénique permet à Kurt Ryslavy d’aborder tous les "dimensions" d’une exposition en même temps. Les oeuvres, le contexte, le public, l’artiste, la galeriste et la vente sont à la fois le sujet et l’objet de son intervention. Il est important de le souligner car, la plupart du temps, une exposition dans une galerie donne à voir des oeuvres d’art mais rarement le contexte et les acteurs qui la constitue et encore plus rarement son but " la vente". L’aspect commercial d’une exposition se traite "en coulisses" et la "marchandisation" des oeuvres d’art rend les artistes plutôt mal à l’aise. Kurt Ryslavy fait ici front sur les deux tableaux: il assume le but commercial de son exposition et ne rougit pas à l’idée que son travail soit une marchandise.
Cette brocante dans une galerie, réponse ironique et distanciée au "problème de la vente" nous renvoit aussi à la problématique "duchampienne" du rapport entre valeur et contexte. L’artiste la revisite en y ajoutant la brocante comme deuxième contexte interférent symboliquement sur le premier. Il confronte la galerie d’art, lieu par excellence de la distinction sociale la plus élevée, à la brocante, faite pour et par les classes populaires. Dans un certain sens, ces deux espaces sont situés à chaque extrémité de la chaîne "sociale et commerciale", et placent les objets dans une sorte de double contexte paradoxal (le jeu des contextes est d’autant plus complexe ici que les objets sont eux-mêmes de provenance "sociale" diverse).
Kurt Ryslavy s’amuse de cette cohabitation tendue symboliquement et en tire parti à plusieurs niveaux. Il se sert de la brocante pour vendre à des prix extrêmement bas pour une galerie et de la galerie pour vendre à des prix extrêmement haut pour une brocante. De telle sorte que la valeur d’un objet est toujours "justifiable" et "injustifiable" (donc arbitraire?). Cela a une incidence sur le comportement du spectateur qui hésite entre l’amateur d’art et le badaud en quête d’une bonne affaire. Kurt Ryslavy confond les statuts de l’artiste et du brocanteur en invitant un "vrai" brocanteur des puces à réaliser une des installations de l’exposition. Il puise dans les ressources des objets et des contextes pour créer des installations qui interrogent le statut "d’une peinture dans une brocante présenté dans une galerie d’art" ou le statut d’un vieil appareil photo Olympus posé sur un socle blanc titré ironiquement "vieil appareil photo avec piles neuves". L’artiste vend et signe, si le client le souhaite, un certificat qui prouve que l’objet a bien été acheté dans une galerie. Ce certificat, lui-même oeuvre de l’artiste, "officialise" l’aura “artistique” de l’objet. Stratagème qui, In fine, opère le seul retour symbolique à "l’ordre social" de l’exposition et à travers lequel l’artiste se réapproprie au dépend du public et de la galerie le pouvoir de décider ce qui est de l’art ou ce qui ne l’est pas.
Cette "précaution d’authentification" n’a cependant pas empêché qu’un drame survienne, assez logiquement d’ailleurs, compte tenu de la "confusion des valeurs" qui régnait dans l’exposition. Lors du vernissage, un enfant demande à son père de lui acheter pour 100€une épée en bois présentée dans la brocante. Le père refuse en argumentant que ce jouet ne "vaut" pas ce prix-là. Un des performers, engagé par l’artiste, lance alors une quête auprès du public pour que l’enfant puisse quand même acheter l’épée. Chaque personne donne 5 ou 10€ et, en peu de temps, la somme est rassemblée (au passage, notons que pareil achat d’oeuvre d’art est assez peu courant dans une galerie d’art). Le père refuse ensuite d’acheter le certificat d’authentification artistique pour 30€ car, selon ses valeurs à lui, "ceci n’est pas de l’art" et, ce faisant, il assène à l’artiste un bon "coup d’épée" dans le ventre.
Cette anecdote atteste d’une certaine façon la réussite de l’exposition de Kurt Ryslavy car elle révèle à quel point la crédibilité de l’artiste et d’une galerie d’art repose sur une série de valeurs qu’il faut éviter de transgresser. Rares, aujourd’hui, sont les expositions qui questionnent avec autant d’acuité ces fondements du champ de l’art . "Alles was minimal ist" nous change un peu de toutes ces expositions "consensuelles et sans problématiques" qui caractérisent notre époque et nous réjouit aussi de voir un artiste prendre la liberté de tourner en dérision l’espace dont dépend sa reconnaissance sociale.
Emmanuel Tête, artiste

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